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  • Arno

Les "Lumières" , c’est quoi ? ( premier épisode )


Antoine Lilty a publié : L’héritage des Lumières (Hautes Etudes 2019) . Dans cet ouvrage, il analyse les différentes composantes des Lumières au 18 ème siècle, en France en Angleterre mais aussi dans le monde ainsi que leurs prolongements jusqu’à aujourd’hui. Malgré cette complexité d’apports et d’évolutions lorsqu’on lui demande de résumer en quelques mots l’héritage des Lumières, deux lui suffisent : émancipation et ironie.

Émancipation, libération du génie de la classe bourgeoise de la pesante et toute puissante tutelle de la noblesse de l’Ancien Régime et de son alliée indéfectible qu’a été l’Eglise catholique, mais aussi et avant tout, libération de l’individu, du citoyen de la misère, de la maladie, des guerres, de l’ignorance, de la superstition, de la faim mais aussi des dogmes de sa sa religion et de son clan.

La volonté de cette marche vers l’émancipation individuelle aboutira à la notion de progrès individuel et collectif.

Mais cette émancipation qui doit aussi éviter l’anarchie et les désordres des jacqueries ou des guerres de religions, ce que permet la méthode avec pour base la raison, la science, l’argumentation rationnelle, la déclaration universelle des droits de l’homme, l’état de droit, la séparation des pouvoirs, la liberté de la presse et des éditeurs.

Mais seule, la recherche de volonté d’émancipation de certains pourrait aboutir à la dictature et à l’intolérance pour les autres. Ce risque a nécessité un antidote puissant qu’est l’ironie.

L’ironie, le second degré, l’humour, le sens de l’autocritique, la certitude que l’on ne voit, ne sait et ne comprend jamais tout et donc que le doute méthodique est indispensable.

Ce doute méthodique motivera et permettra une tolérance sincère envers les opinions de l’autre dont la liberté de pensée et d’argumentation tout comme la sécurité devront toujours être assurées.

L’ironie seule aboutirait au cynisme, au relativisme systématique et à l’impuissance politique mais la tension du couple émancipation et ironie permettra le progrès réel des chances de chacun de pouvoir construire son bien-être mais sans l’intolérance dictatoriale fossilisante de l’état ou des gardiens autoproclamés du dogme à la mode.

Steven Pinker à publié «  Enlightenment Now » en 2018, traduit par Les Arène sous le titre « Le triomphe des lumière ». Pour définir l’enseignement les Lumières il reprend la citation fondamentale de Kant en 1764 « Aïe le courage de te servir de ton entendement «

Mettre sa raison et sa sympathie envers autrui, son humanisme au service du progrès l’épanouissement humain individuel et collectif.

La raison avant toute chose qui enfantera la méthode scientifique aidée par les mathématiques pour observer puis modéliser et tenter de comprendre puis maîtriser,de mieux en mieux, notre réalité.

Ensuite l’idée d’universalité de la nature humaine et de sa capacité de raison, de sympathie, de compassion, de bienveillance, fondations de l’Humanisme, d’une morale laïque qui placera le bien-être de l’homme, de la femme et de l’enfant dans la vie réelle au-dessus des dogmes religieux et des carcans tribaux, raciaux ou nationalistes.

De cette notion d’universalité découlera la démarche de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen non plus d’un seul pays ou d’un seul univers religieux mais du monde et de sa diversité assumée avec l’avènement du cosmopolitisme.

Le progrès sera le nom de cette marche désirée vers plus de liberté , de bonheur et de bien-être pour le plus grand nombre de nos semblables par expérimentation méthodique, par essais et erreurs.

Cette prospérité, cette paix, ce progrès du bien-être individuel et collectif, la capacité de chaque citoyen de pouvoir cultiver la sympathie, de conquérir les bases essentielles du raisonnement et du dialogue argumenté, de jouir de sa liberté d’expression et d’organisation n’allait pas être un cadeau magique mais le fruit d’une création humaine : le gouvernement basé sur la notion d’un contrat social entre gouvernants et gouvernés.

Cette notion est clairement explicitée dans la déclaration d’Indépendance des Etats-Unis du 4 juillet 1776 :

“Nous tenons pour évidentes par elles-mêmes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux ; ils sont dotés par leur Créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. Les gouvernements sont établis par les hommes pour garantir ces droits, et leur juste pouvoir émane du consentement des gouvernés. Toutes les fois qu’une forme de gouvernement devient destructive de ce but, le peuple a le droit de la changer ou de l’abolir, et d’établir un nouveau gouvernement, en le fondant sur les principes et en l’organisant en la forme qui lui paraîtront les plus propres à lui donner la sûreté et le bonheur

L’ancestral pouvoir politique de droit divin est donc remplacé par la notion de contrat social tacite par lequel les citoyens doués de raison et égaux en droit délèguent pour un temps défini au gouvernement démocratiquement élu le pouvoir de coordonner l’action de tous les citoyens vers la liberté et le plus grand bien-être individuel pour le plus grand nombre dans le monde réel et non dans un hypothétique au-delà magique.

Mais dans les faits, par rapport aux anciens régimes autoritaires de de droit divin, ou en comparaisons avec les dictatures dogmatiques, les gouvernements issus du siècle des lumières qui prônaient l’émancipation, la liberté, l’ironie, le droit à la recherche de son bonheur dans sa vie terrestre, l’humanisme, l’universalité des droits avec pour outils la raison, la science, le droit, le contrat social comme légitimation du gouvernement, la séparation des pouvoirs, la séparation du politique et du religieux ont-ils donné de meilleurs résultats dans la vie réelle des populations concernées ?


Nous analyserons cela dans un prochain épisode ...




Thomas Jefferson fut le principal auteur de la déclaration d’Indépendance des Etats-Unis. Il finit son travail le 21 juin 1776 et le soumet au comité qui fait quelques modifications. La déclaration est encore amendée au cours des débats du Congrès : les passages sur la traite et l'esclavage sont supprimés, afin de ne pas mécontenter les régions du Sud. Le document définitif, écrit sur du papier de chanvre, est approuvé et signé le 4 juillet par 56 délégués réunis à l'Independence Hall. Jefferson fait six copies du manuscrit du 28 juin et il souligne les passages éliminés.

Le texte initial dénonçait les propriétaires « déterminés à garder ouvert un marché où les hommes peuvent être achetés ou vendus » et le roi George III accusé de pratiquer la traite des esclaves. Le paragraphe est finalement supprimé, l'esclavage étant maintenu, il restait donc, comme toujours, encore beaucoup de progrès à réaliser ...

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